Vivre et surmonter la prématurité : Le parcours de Gaël

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Certains d’entre vous le savent, mes jumeaux sont arrivés prématurément à 7 mois. Cela a entraîné une hospitalisation de 3 semaines pour mon fils (1,6 Kg à la naissance) et près de 2 mois pour ma fille (1,1 kg à la naissance). Pourtant, je n’avais jamais abordé ici le sujet de la prématurité qui concerne 8% des naissances (60 000 bébés naissent avant les 8 mois de grossesse en France chaque année). Des circonstances communes m’ont conduit à rencontrer Gaël, un père de bébé prématuré. Papa d’un petit garçon de 18 mois, il a également vécu la même aventure avec son fils, né à 6 mois de grossesse.

Avec sa femme, il a parcouru ce long chemin pour que son fils soit aujourd’hui en pleine santé. Père d’un bébé prématuré, il a transformé cette expérience en force. Professionnellement, Gaël est un entrepreneur engagé depuis longtemps pour diverses causes. Naturellement, il a décidé de lancer une nouvelle entreprise sociale, Petit mais Costaud, dédiée aux parents de bébés prématurés, avec pour mission de soutenir au maximum les parents vivant cette épreuve difficile… Gaël, un exemple d’engagement et de force. Portrait d’un père définitivement inspirant.

La découverte de la prématurité

Gaël, 33 ans, et Laure, 35 ans, forment un couple heureux depuis près de 4 ans. Au printemps 2019, le couple apprend avec joie l’arrivée prochaine de leur premier enfant. La grossesse se déroule facilement et sereinement. En septembre, le couple part en vacances à New York, avec de longues balades de 15 Km par jour. Au retour, Laure, alors à 5 mois et demi de grossesse, passe un contrôle à l’hôpital. Le couple découvre avec stupeur un risque élevé de prématurité pour leur bébé. C’est le premier choc de leur vie de futurs parents.

Laure est hospitalisée en urgence pendant 15 jours. Après cette période, elle rentre à la maison, mais 24 heures plus tard, le couple retourne en urgence à l’hôpital. Le personnel médical décide alors de procéder à l’accouchement. Leur fils, Mahé, naît à 6 mois (à 29 semaines).

Le long marathon en néonatologie

Mahé, pesant 1,5 kg, est placé en couveuse, en service de réanimation. À 29 semaines, de nombreuses fonctions ne sont pas encore développées chez le bébé. « Les premiers jours ont été atroces. Les médecins nous disaient « on ne peut rien vous dire sur la suite. Chaque heure est une heure gagnée. Le pronostic vital est engagé, on ne peut rien prédire de la suite ».

Le couple passe chaque jour entre 12h et 16h à l’hôpital auprès de Mahé. « Nous n’étions pas dans le déni. La résilience a fait son œuvre. Nous étions très investis et présents à ses côtés. Ma formation en hypnose nous a aidés, nous avons fait énormément de séances d’auto-hypnose durant cette période ». Au total, Mahé est resté près de 70 jours à l’hôpital. « C’est un véritable marathon. Il y a eu des moments très difficiles où notre fils n’arrivait pas à respirer ou à manger. Nous vivions au rythme des machines, des bips, des mots des médecins. Nous étions en mode « pilote automatique », notre vie était dédiée à l’hôpital. Mais nous étions portés par la force de notre fils qui se battait chaque jour pour grandir ». La force est également celle de la maman et du papa prématuré.

Gaël découvre également la manière dont est gérée la prématurité en France. « On a découvert des soignants extraordinaires et un environnement ultra-médicalisé en réanimation. Mais aussi un environnement parfois peu accueillant pour les parents. On ne peut pas dormir avec notre bébé, ou très mal. On manque de fauteuils, qui ne sont prévus que pour les mamans. Il y a peu de place pour le papa prématuré. Et ensuite, en chambre pédiatrique, tout était très vétuste. De même, nous avons dû attendre 15 jours pour obtenir un RDV avec la psy de l’hôpital. Toutes ces conditions ajoutent un stress important à une situation déjà lourde à gérer ».

Une vie entre parenthèses

Durant cette période, la famille et les amis se mobilisent autour des jeunes parents. « Ils s’occupaient de l’appartement, de nos lessives. Ils nous préparaient des repas ». Parfois, des mots maladroits sont prononcés par méconnaissance de la prématurité. « Des proches nous disaient parfois « reposez-vous et réjouissez-vous, tout va s’arranger ». Ce n’était pas approprié ».

Gaël met également sa vie professionnelle en pause. « J’avais décidé de m’arrêter de travailler 6 mois pour dédier ce temps à ma femme et mon fils. Finalement, je me suis arrêté totalement de travailler quasiment un an ».

Après 70 jours d’hôpital, la famille peut enfin rentrer chez elle. « Nous n’avions pas du tout de crainte de rentrer chez nous. C’était plutôt une vraie libération ! Nous avons eu la chance d’avoir à nos côtés des soignants extraordinaires qui nous ont mis en confiance ». Cependant, le retour à la maison n’est pas sans défis. La première année de Mahé est ponctuée par de nombreux rendez-vous médicaux. « Au départ, une visite médicale tous les jours à la maison, puis parfois jusqu’à 3 à 4 rendez-vous par semaine à l’hôpital. Cela s’est progressivement allégé, et tout est rentré dans l’ordre aujourd’hui, nous avons juste 2/3 rendez-vous par an. Nous avons eu de la chance, il n’y a pas eu de complications ». Durant cette première année, les parents investissent toute leur énergie pour que Mahé grandisse sereinement. « Nous avons fait énormément de peau à peau, parfois 5 heures par jour. Et nous avons écouté beaucoup de musique, cela calmait Mahé ».

Papa prématuré : l’engagement et la création de Petit mais Costaud

Gaël est un homme engagé depuis longtemps. « Enfant, je me souviens avoir été marqué par le sort d’un sans-abri dans la rue. Cela m’a énormément frappé et ne m’a jamais quitté. J’ai choisi des années plus tard d’entrer à l’ESSEC qui proposait une chaire « entrepreneuriat social ». J’ai intégré au cours de mes études le Groupe ARES (organisation qui favorise l’insertion des personnes en grande exclusion) puis j’ai créé plusieurs entreprises à impact environnemental et sociétal ». L’expérience de la prématurité de son fils l’a conduit naturellement à son nouveau projet. « Après 12 ans dans l’entrepreneuriat social, j’ai décidé de m’impliquer sur le sujet de la prématurité. Je voulais être utile. Que notre histoire serve. Que d’autres parents puissent le vivre différemment. Et nous avons créé, avec ma femme, Petit mais Costaud en septembre 2020, un an après la naissance de Mahé ». Pour que cet épisode de vie de papa prématuré soit plus facile à vivre pour d’autres parents…

Pour ce projet, Gaël et Laure s’entourent de spécialistes. « Nous nous sommes d’abord rapprochés de l’association SOS Préma. Ils nous avaient beaucoup aidés durant plusieurs mois ». Puis le couple s’entoure de spécialistes : personnels soignants, pédiatre, psychomotricien, ostéopathe, styliste spécialisée pour les bébés prématurés. « Il n’existe pas à notre sens de vêtements réellement adaptés aux prémas. Et encore moins de vêtements disponibles à prix accessibles. Il existe principalement des bodys et pyjamas en taille réduite mais la réalité du besoin est plus complexe. Les bébés prémas ont une peau extrêmement fragile. Ils ont besoin de vêtements avec des coutures spécifiques. Mais aussi des finitions adaptées aux appareils médicaux dont les bébés prématurés sont équipés. Ils ont aussi besoin de vêtements qui facilitent le mouvement et conservent bien la chaleur corporelle. Nous avons donc décidé de créer des vêtements Made in France dédiés qui seront disponibles en septembre 2021 ». La prématurité touchant plus spécifiquement des familles moins aisées, Petit mais Costaud va plus loin. Ils proposent « une boutique solidaire qui reverse 10% des ventes à SOS Préma et des packs de vêtements à la location grâce aux dons d’autres familles ». Enfin, le couple propose également des conseils de professionnels du secteur de la prématurité via le blog de la marque.

Une éducation consciente et engagée

Naturellement, l’éducation que Gaël offre à son fils est en parfaite adéquation avec sa philosophie de vie. « J’ai une grande conviction qui réside dans l’importance du cadre. Mais non pas en termes de règles ou de valeurs mais en termes de sécurité émotionnelle, de confiance en soi pour s’exprimer et de curiosité naturelle. C’est pour moi les enjeux clés de l’éducation ». Gaël vit cette démarche en toute humilité. « Nous ne sommes pas du tout des parents parfaits ! Ils nous arrivent de crier mais nous nous excusons ensuite auprès de Mahé. Nous lui exprimons nos émotions et aussi nos faiblesses ».

Gaël essaye de proposer le cadre juste pour son fils. « Il y a peu de temps, Mahé voulait essayer de monter des marches dans l’escalier. J’étais OK les 10 premières fois mais à la 11ème, je lui ai demandé d’arrêter. C’est important de lui apprendre également la frustration ».

L’équilibre vie professionnelle et personnelle du papa

En papa bien dans son époque, Gaël arrive à concilier sa vie de famille et celle d’entrepreneur. « C’était un de mes plus gros objectifs. Je voulais être présent. J’organise ma vie professionnelle en fonction de ma vie de famille. C’est parfois complexe mais j’arrive à avoir du temps qualitatif et quantitatif avec ma famille. Je suis 100% dédié à mon fils de 6h à 9h et de 19h à 21h. Je prends régulièrement des vacances et des week-ends prolongés en famille ».

Pour y arriver, Gaël utilise plusieurs astuces qui fonctionnent très bien pour lui. « Cela passe par beaucoup d’organisation et des outils de « productivité ». Quand je suis sur des sujets de fond, je coupe toutes les notifications sur mon smartphone ou les mails. Je fais principalement des réunions de 30 minutes et jamais le matin car c’est le moment où je suis le plus efficace sur les sujets de réflexions ». Et cette organisation bien huilée lui permet de libérer des journées juste à deux avec sa femme. « Ainsi, j’arrive à avoir de vrais moments à deux et à trois avec notre fils ! ».

Une prématurité désormais lointaine

La prématurité semble déjà loin, bien qu’elle fasse partie de leur histoire à tous les trois. Mahé ne souffre aujourd’hui d’aucun retard de développement. C’est un bébé heureux qui laisse de jolis souvenirs à son papa au quotidien. « Mon souvenir le plus drôle est une situation que beaucoup de parents ont vécue : j’ai eu droit, quand nous étions encore à l’hôpital, à un pipi + caca sur moi ! Et il y a déjà tellement de beaux souvenirs. Le premier « papa » de mon fils, le premier fou rire ensemble, son premier bisou qui date d’il y a juste quelques semaines… ».

L’histoire de Gaël est forte et définitivement inspirante à bien des égards. Présent durant des mois à l’hôpital auprès de son fils avec sa femme, il a ensuite choisi de transformer cet épisode de vie en une entreprise pour aider d’autres parents de bébés prématurés. Avec l’engagement et le regard tourné vers l’autre chevillé au corps de son papa, le petit Mahé peut grandir sereinement. Son papa sera là, à ses côtés, pour contribuer à un monde plus altruiste et solidaire demain et l’aider à avancer sur le beau chemin de la vie.

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